Penser aux autres.
« Je suis retraitĂ©, donc, pour lâinstant je nâai pas de baisse de revenu. Je ne pouvais de toute façon faire des Ă©conomies. A lâavenir il faudra compter un peu plus car nos enfants et petits-enfants sont et seront touchĂ©s par la crise Ă©conomique et notre devoir sera de les aider. A ce propos on entend souvent que ma gĂ©nĂ©ration de retraitĂ©s est privilĂ©giĂ©e. Je vous rassure, quels que soient nos revenus nous compensons tous les mois les salaires dĂ©risoires et alĂ©atoires de nos enfants et petits-enfants. Nous nâavons pas de bas de laine. » Observatoire FreeThinking des Classes Moyennes
Ă chacun son avenir incertain. En 2019, au plus fort de la crise des Gilets Jaunes, les Français nous disaient Ă quel point envisager lâavenir avec sĂ©rĂ©nitĂ© Ă©tait difficile, voire impossible.  Se projeter avec eux, câĂ©tait constater que la France Ă©tait passĂ©e dâune sociĂ©tĂ© du risque â oĂč prĂ©parer lâavenir est un dĂ©fi, mais reste gĂ©rable – Ă une sociĂ©tĂ© de lâinsĂ©curitĂ©. Une sociĂ©tĂ© oĂč le risque nâest plus manageable. Une sociĂ©tĂ© dans laquelle imaginer son avenir et celui de ses proches place souvent face Ă des choix impossibles. RetraitĂ©s, Ă©tudiants, travailleurs indĂ©pendants, petits commerçants, jeunes adultes et jeunes seniors, cette sociĂ©tĂ© de lâinsĂ©curitĂ©, câest celle de toutes les classes moyennes. Trouver un emploi Ă la hauteur de ses aspirations, gĂ©rer une pĂ©riode de chĂŽmage, accĂ©der Ă la propriĂ©tĂ©, prĂ©parer sa retraite, aider un enfant adulte Ă faire face Ă un imprĂ©vu, financer les Ă©tudes de ses enfants ou de ses petits-enfants, anticiper sa propre dĂ©pendance ou gĂ©rer celle de ses parentsâŠchacun est concernĂ© par au moins un de ces sujets dâinquiĂ©tude, trĂšs diffĂ©rents les uns des autres mais toujours interdĂ©pendants.
Cette insĂ©curitĂ© existentielle, la crise sanitaire et la crise Ă©conomique quâils jugent inĂ©luctable, viennent aujourdâhui la renforcer et provoquer une rĂ©action de dĂ©fense positive comme une rĂ©action de dĂ©fense immunitaire collective. Face au sentiment que la France est plus vulnĂ©rable que jamais, que tout peut arriver, la solidaritĂ© sâimpose dans les conversations comme une aspiration plus que jamais nĂ©cessaire.
SolidaritĂ© nationale : de lâespoir au dĂ©senchantement.
Dans cette pĂ©riode de turbulences, la coopĂ©ration, les partenariats, lâentraide entre les citoyens, les consommateurs, les institutions et les entreprises, sont jugĂ©s indispensables pour espĂ©rer des jours meilleurs. Tant pour colmater les brĂšches Ă©conomiques et sociales provoquĂ©es par la crise que pour recrĂ©er une dynamique positive, profitable Ă tous. Donner la prioritĂ© au Made In France et aux petits commerçants de proximitĂ© pour lutter contre les fermetures et le dĂ©peuplement des centres villes, pour sauver les emplois et minimiser lâaugmentation du chĂŽmage, pour redonner aux jeunes une place sur le marchĂ© du travail et des garanties pour lâavenir⊠Des solidaritĂ©s nouvelles Ă crĂ©er pour protĂ©ger les plus fragiles et les moins abritĂ©s dâun darwinisme social menaçant. Un mouvement entrevu pendant le premier confinement et quâils aimeraient voir perdurer demain.
Mais pour beaucoup, le changement relĂšve plus de lâutopie que dâune Ă©vidence. La vie suivant son cours, la sociĂ©tĂ© risque dâen faire de mĂȘme en continuant de sâorganiser autour dâun individualisme exacerbĂ© et dâun Ă©goĂŻsme qui tend Ă mĂȘme Ă se radicaliser, au fur et Ă mesure que la sĂ©quence Ă©pidĂ©mique se poursuit. Lâunion nationale risque de nâĂȘtre que de façade et le dur retour Ă la rĂ©alitĂ© difficile Ă encaisser.
SolidaritĂ© familiale et intergĂ©nĂ©rationnelle : lâinvention du « niveau de vie partagé ».
Quand les clignotants sont tous au rouge, quand la solidaritĂ© nationale est trop hypothĂ©tique pour ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme un recours incontestable, câest la famille qui sâimpose dans lâesprit de ces Français des classes moyennes comme le meilleur des boucliers. Câest, pour les parents et les grands-parents, rĂ©ussir la prouesse de se mettre en position de survivalisme Ă©conomique collectif : rĂ©inventer la notion de tribu au sens socioĂ©conomique, se resserrer, se souder pour faire face. Une attitude hyper-dĂ©flationniste qui consiste Ă anticiper Ă la fois la baisse de ses propres revenus et celle, probablement durable, de ses enfants ou petits-enfants. Constituer « quoi quâil en coĂ»te », une Ă©pargne de prĂ©caution pour se donner les moyens de toujours ĂȘtre en capacitĂ© de rĂ©agir en cas de coup dur et dâaider les siens. RĂ©inventer la notion de tribu au sens socioĂ©conomique du terme, câest inventer le « niveau de vie partagé », celui qui dĂ©passe le cadre de lâindividu, du foyer pour prendre en compte la famille Ă©largie.
Si la solidaritĂ© intergĂ©nĂ©rationnelle des nouvelles tribus est un recours naturel, elle nâest pas pour autant un recours Ă©vident. Car elle expose Ă des arbitrages douleureux pour les plus anxieux qui craignent « lâimpasse gĂ©nĂ©rationnelle ». Que faudra-t-il privilĂ©gier dans un avenir proche ? Que faudra-t-il sacrifier ? Lâavenir de ses petits-enfants, le financement de sa retraite, et demain peut-ĂȘtre de sa propre dĂ©pendance ? Des questions Ă la fois trĂšs concrĂštes et brutales, qui ne sont bien sĂ»r pas posĂ©es par tous, mais qui sont suffisamment prĂ©sentes pour quâon puisse prendre la mesure du stress qui parcourt la sociĂ©tĂ© française.
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Comme un pense-bĂȘte pour une nouvelle Ă©poque : voici les 10 grandes rĂ©solutions pour 2021 exprimĂ©es par les Français des classes moyennes sur notre plateforme conversationnelle durant cette annĂ©e 2020 peu ordinaire.
1. Garder la bonne habitude de consommer détox.
2. Soutenir mes petits commerçants.
3. Plus que jamais, prendre soin de ma santé et de celle de mes proches, dans chacun de mes actes quotidiens.
4. Un jour, arriver au 0 déchet.
5. Redécouvrir les petits bonheurs de la vie normale.
6. Consommer patriote (dans la mesure de mes moyens).
7. Apprendre Ă me dĂ©brouiller seul et Ă faire moi-mĂȘme ce que je peux.
8. Voir plus loin que les étiquettes.
9. Faire confiance Ă la jeunesse.
10. Penser aux autres.